13 septembre 2008

Plein les sens

Une fille de l'iceberg? Mais qu'est-ce qu'elle chante, là? Si elle est vraiment coulée dans la même eau qu'une banquise, Ariane Moffatt avait oublié ses glaçons dans le bac du congélo, vendredi. La tournée qu'elle mouillait au Vieux Clocher de Magog n'est pas une seule goutte frigorifique. Sensuelle. Intime. Chaleureuse. Oui. Mais arctique? Et moi, je suis un pingouin, oui...

J'ai des souvenirs encore frais, conservés dans la congère de ma caboche, d'un concert de la tournée précédente: Vieux Clocher de Sherbrooke, sens dessus dessous, la gauche rendue à droite, bordel total d'improvisation musicale, orgie de beats, tout le monde en l'air... À l'image de l'album dont elle s'inspire, la tournée Tous les sens est moins étourdie, plus recueillie, surtout en première partie. Parce que les chansons, en soi, n'ont besoin d'aucune glaçure, elles se passent de bidouillages excessifs ou d'effets épileptiques.

«Sans leurs petites pantoufles de confort», qui se tricoteront au fil de cette tournée automnale, les chansons vivent bien sans mise en scène stricte ni décor (un écran pour projections sera bientôt intégré à la tournée). Et voilà les frissons qui font leur bonhomme de chemin jusqu'au coeur ? pas celui qui est dans la tête ?, et entrent par tous les sens... Les cinq.

Avec ses lunettes inspiration Vuarnet et son polo à lavallières, la chanteuse paraissait en pleine forme pour sa première non insulaire (trois répétitions ont eu lieu aux Îles-de-la-Madeleine cet été). Elle a admis avoir vu Daniel Bélanger sous ce même clocher il y a une semaine et s'est donc senti l'obligation d'être aussi drôle dans ses interventions. Elle l'a été en amorce de La fille de l'iceberg, en repiquant le succès oublié d'un certain Vanilla Ice. Ou encore quand elle a raconté la genèse de la passionnée Petit animal, soit la tocade d'un raton-laveur estrien pour une séduisante porc-épic. Blagues à part, si elle est nommée sept fois pour le prochain gala de l'ADISQ, c'est parce qu'elle sait faire de la fichue bonne musique.

Toutes les chansons du dernier opus ont été traitées sans décalage par rapport à leur version originale. Qu'ajouter, de toute manière, aux Invectives, une fois qu'on conserve le quatuor à cordes sur bande? Qu'ajouter encore à la tendre Hiver Mile-End et à la groovante Reverbère? Elle a trouvé: des harmonies vocales. Le plus grand travail d'arrangements se trouve d'ailleurs dans cette polyphonie agréable, des quatre musiciens qui chantent en choeur.

Entendues aussi: les Point de mire et Le Coeur dans la tête, épurées, et Will You Follow Me, en intermède disco-club. Vu: un public plus varié qu'avant, parmi lequel on a vu Clémence DesRochers et Marie-Michèle Desrosiers. Touché: moi, rien, mais les musiciens, tout. Les quatre malins passent d'une bébelle à un instrument à un autre jouet. Goûté: aux airs de la bassiste Marie-Pierre Fournier, chargée de la première partie. Avec une dégaine farouche qui fait penser à Feist, elle n'a pas tout à fait convaincu, avec trois courtes chansons interprétées à la guitare sèche, mais il s'en faudrait de peu.

Senti: que cette tournée va marcher. Encore. Il reste peu de billets pour la deuxième représentation samedi soir, toujours à Magog, mais elle passera par le Granada le 10 octobre.

Qui est vraiment contre la fonte des glaciers?


Laura Martin - La Tribune

Aucun commentaire:

Publier un commentaire