Quelques minutes seulement après un concert endiablé sur l’une des scènes de Solidays, Ariane Moffatt nous accorde une interview proche de sa loge. Malgré la fatigue causée par le décalage horaire entre Paris et Montréal, la chanteuse québécoise est rayonnante, affable et prête à répondre à toutes nos questions. L’accueil positif offert auparavant par le public a dû faire effet sur le moral de la chanteuse qui nous impressionne avec tant d’énergie.
Tu viens juste de sortir de scène, quelles sont tes impressions ? Que retiendras-tu de ce concert ?
J’ai vraiment kiffé. On m’avait dit que le public de Solidays, c’était toujours quelque chose de très particulier, avec une ambiance. Ca valait le coup de faire l’aller / retour de Québec à Paris pour rencontrer ce public très ouvert et actif ; « à donf » du début à la fin. On a sué, mais pour de bonnes raisons.
Tu ne t’attendais pas à un retour aussi positif de la part du public français ?
Je sais qu’en festival, il y a toujours des mélomanes présents mais je suis encore en développement en France. Du coup, j’essaye de ne pas avoir d’attentes ou d’a priori. Quand ça se passe vraiment bien comme aujourd’hui, je suis surpris par la vibe électrique qui se produit.
C’était un grand moment de jouer avec – M- sur scène aujourd’hui même si c’est quelqu’un avec qui tu as l’habitude de collaborer. Peux-tu nous en dire plus ?
On s’est vu ici, juste après notre arrivée de l’aéroport. Ca faisait longtemps qu’on ne s’était pas vu. La dernière fois, c’était pour la première partie au Zénith au printemps. C’est lui qui m’a proposé de me rejoindre sur scène « hey ce serait cool si on faisait quelque chose ». C’était complètement improvisé, très bon esprit. Voir Mathieu jouer sur ma guitare qui ne fonctionne à moitié, j’étais presque gênée de lui prêter cette guitare. Il dégage une véritable essence. Il s’en fout de bien placer ses mélodies, ça fonctionne toujours, il est complètement dans le truc…
… en plus il était relax sur scène, en short, loin de ces costumes habituels…
C’est ça ! Il était là dans une ambiance festivalière, avec son short bleu. Complètement détendu ! [rires]
Il y a d’autres artistes avec lesquels tu souhaiterais participer, français comme québécois ?
Il y en a pleins ! Vous avez de nombreux artistes formidables. Je pense à Gaëtan Roussel, j’aime beaucoup sa plume, je sais que c’est un artiste qui a beaucoup de choses à offrir et j’aimerais collaborer avec lui. Sinon, j’aime beaucoup Murat, sa couleur musicale et sa façon de créer. Ca rentre en résonnance avec mes sources d’inspiration comme Camille ou Keren Ann.
D’autant plus que les artistes que tu cites ont été exporté au Québec…
Tout à fait, il en vient de plus en plus. C’est un véritable raz de marée et tant mieux. De même de votre côté, vous pouvez découvrir des groupes comme Karkwa. Des vrais amis, qui nous prêtent régulièrement du matos pour la scène, comme aujourd’hui.
Les musiciens ont l’air de former une grande famille au Québec car tu joues en ce moment avec la bassiste de Creatures sur ta tournée…
Oui, Amélie. La musique au Québec est un petit milieu. On est six fois moins nombreux que vous donc tout le monde se connait. On est une petite famille qui se retrouve dans les quelques endroits qu’il reste pour jouer. On monte des projets plus indé dans les bars afin de susciter des mouvements et des rencontres. Montréal est une super ville pour être musicien. Beast, vous connaissez peut-être ?
Oui, oui, ils sont passés à la Maroquinerie récemment…
Jean Phi est celui qui a réalisé mon album. Ce sont de très bons amis, on est proches de la scène comme dans la vie.
Tu aurais d’autres artistes québécois à nous conseiller ?
Il y a un groupe qui s’appelle Radio Radio, qui vient du Nouveau Brunswick. C’est vraiment à découvrir. Ils jouent un hip hop très personnel avec leur accent chiac. Si vous ne comprenez rien au québécois, alors vous comprendrez encore moins le chiac ! (rires). Yann Perreau, mon ami auteur-compositeur, qui est une bête de scène. Il est bien entouré, il a de quoi faire sonner les oreilles. Marie Pierre Arthur, qui tourne aussi de Karkwa, Patrick Watson. Elle fut ma bassiste durant ma précédente tournée avant de sortir un album solo. Bref, y en a tout plein à découvrir !
Bon, sinon parlons un peu plus de toi…
… ah, enfin ! M, les québécois… à moi, maintenant ! (rires).
Quelle est ton actualité ? Tu prépares un nouvel album ?
J’étais sur scène tout à l’heure, je me demandais « merde, pourquoi est-ce que je n’ai pas plus de festivals cet été en France ? ». A mon grand regret, j’ai fait tout ce qu’il faut mais je n’ai obtenu que peu de dates. Je vais jouer aux Francofolies avec Jil is Lucky et Revolver ; ça va être bien, j’ai hâte. Je vais donner beaucoup de shows au Québec mais j’ai déjà participé à de nombreux festivals l’année dernière. C’est un peu la fin de l’album. Je vais aller au mois d’août en Chine pour jouer à l’exposition universelle de Shangaï et faire un voyage durant un mois. Ce sera un moment de transition avant de retourner dans mon local composer de nouvelles chansons.
Quelle direction souhaiterais-tu donner à ces nouvelles compositions ?
C’est assez flou pour l’instant. J’ai envie de prendre mon temps pour composer. Ca fait trois albums que j’enchaine au Québec. J’ai le goût de me concentrer sur le prochain. Peut-être que l’électro va prendre un peu le bord et que je vais me concentrer sur quelque chose de plus organique. Tout ça, c’est des mots en l’air donc ça ne veut rien dire … il faut passer à l’action maintenant ! J’ai trouvé un nouvel endroit pour composer. J’ai habité à Paris les derniers mois, j’ai laissé quelques affaires, du matériel, je me suis éparpillée chez des amis. Maintenant, j’ai tout rassemblé dans un local à Montréal avec vue sur le Mont Royal, de grandes fenêtres, du coup je suis pressé de me remettre à bricoler mes mélodies.
Tu disais tout à l’heure, que tu étais encore une artiste en développement en France. Selon toi, quelles sont les prochaines étapes pour devenir une artiste confirmée ?
Je dois suivre mon processus créateur en premier lieu. J’ai fait l’effort de venir vivre en France pour essayer de développer mes projets. J’ai eu l’envie d’écouter les gens, les musiques, l’industrie. J’ai envie de me concentrer sur mon cheminement artistique. C’est ce que tout créateur devrait faire mais des fois on investi un peu plus pour être sur place. J’ai envie de faire un album qui va tout … tuer ! (rires).
Revenons aux choses sérieuses. Ton album est relativement pop, comment fais-tu sur scène pour le rendre aussi rock’n’roll ?
Je fais de la pop et je l’assume pleinement. Je pense qu’on peut être élitiste et simple à la fois. En live, t’as envie d’aller plus à fois. Le rock prend plus de relief que l’electro. C’est un cheminement logique pour donner plus de ressenti, avec de la hargne.
Et quel est ton rapport avec le hip hop ? Tu as repris en live une chanson de M.I.A aujourd’hui…
J’écoute beaucoup de styles musicaux différents et je suis vraiment fan de ce que peut faire M.I.A notamment. Ce ne sont pas des chanteurs qui font partie de la chanson francophones mais on doit rester ouverts …
D’ailleurs, par rapport à la francophonie, il y a de nombreux artistes québécois militants. Est-ce que tu te considères comme en faisant partie ?
Aux victoires de la musique, j’étais la seule à chanter en français alors que j’étais entouré de groupes français (de France !). L’enjeu de préserver la langue française ici, n’est pas le même que chez nous où ça reste fondamental. Le français est ma langue première et je me sens le devoir de la préserver. D’autant plus que le Québec est coincé entre provinces anglophones. J’écoute presque exclusivement de la musique anglophone et je compose en anglais, mais c’est important pour moi de chanter en français. A la radio, dans la presse, les nouvelles générations écoutent de moins en moins de musique francophone donc il faut défendre cette langue. Cependant, ça ne veut pas dire qu’un jour je ne chanterais pas en anglais…
Ca ne serait pas mal perçu de sortir un album en anglais au Québec ?
En ce moment, je reprends des grands hits en anglais pour une série télévisée au Québec. De belles grandes chansons qui accompagnent chaque épisode. Ca a soulevé quelques controverses mais pas grand-chose non plus. Je pense que les gens au Québec voient que j’élargie mes horizons artistiques. J’espère qu’ils respecteront mes choix mais c’est vrai que les québécois peuvent ce fâcher avec cela !
Dernière question pour clôturer cette interview. Tu disais habiter en France. Tu es capable de parler en verlan ?
Aïe, aïe, aïïïïe ! Ca serait sûrement ringard et pas très sérieux…. « j’kiffe ma race à donf, j’fais la teuf à day-solis ! »
… à quoi ?!
A day-solis… Solidays ! (rires)
Bien joué ! T’as réussi à me perdre…
Merci beaucoup à Ariane Moffat pour sa gentillesse et sa disponibilité pour répondre à nos questions.
Nous remercions aussi Godefroy Pizon, Columbia, LC Les Filles et l'organisation des Solidays pour nous avoir permis de rencontrer cette formidable artiste.
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